SESSION # 8 • Trois jours d’immersion dans les maisons de Région. À la rencontre des usagers.
1. L’immersion, l’enquête de terrain outillée
Après Font-Romeu en septembre où nous avions reçu et analyser la commande dans la neige, Bézier où nous avions conçu le dispositif d’enquête et ses outils originaux, la 8ème session a enfin confronté les visions et hypothèses énoncées sur un périmètre géographique très large. Le travail d’enquête en immersion s’est déployé depuis les Hôtels de Région de Toulouse et Montpellier, où l’équipe a interviewé des décideurs et des agents du siège sur la circulation de l’information avec les Maisons de Région, jusqu’aux rues de Carcassonne, Foix, Limoux et Perpignan où un grand nombre d’habitants ont été rencontrés.
Dans le même temps, les différentes équipes sur le terrain ont été accueillies par des partenaires pour échanger sur les conditions de partenariats locaux, et bien sûr par les agents des Maisons de Région existantes et de bureaux territoriaux sur le point de devenir des Maisons de Région. Grâce à ce travail multi-sites, il a été possible de découvrir les agents de MDR dans leur environnement professionnel au quotidien et d’avoir une meilleure perception de la diversité des situations qu’ils rencontrent. Les agents en formation ont pu approfondir les techniques et outils de l’enquête de terrain à visée créatives.
Des outils adaptés pour chaque contexte d’enquête
Les entretiens individuels
Des entretiens semi-directifs ont été menés avec des partenaires extérieurs (services de l’Etat, associations, autres collectivités…) afin de capter leur perception de l’action de la Région et de ses Maisons de Région, actuel ou attendu à l’avenir.
En parallèle aux entretiens semi-directifs Nous avons développé nos propres outils contributifs afin d’interviewer les agents sur ces points lors d’enquête de rue ou de focus groups.
“Imagine ta MDR”
“Imagine ta MDR”est un outil qui a été largement utilisé avec les habitants et les agents du siège et de la MDR. Celui-ci est composé de cartes par domaine de missions : formation, économie et transport + une carte joker. Il est demandé à la personne interrogée de choisir les cartes qui représentent le mieux, selon elle, les missions actuelles et futures des MDR. Les cartes jokers servent à inscrire leurs propositions librement. Cet outil a été utilisé avec plusieurs interlocuteurs : aussi bien des agents du siège à Toulouse, que des usagers à Carcassonne, Foix ou Limoux.
La jauge de l’autonomie
L’outil jauge d’autonomie (outil semblable à celui que l’on trouve sur les avis d’internautes) nous a permis de questionner décideurs et responsables de MDR sur le niveau d’autonomie actuel et souhaité des MDR sur différents pans de leur activité afin de confronter les visions.
Le parcours de l’information
L’outil “Parcours de l’information”, ou comment circule l’information entre chaque strate dans le système régional (usager à MDR / MDR à service au siège / service au cabinet), est lui composé d’un plateau de jeu dessiné et de cartes Acteurs/Idées/Problèmes.
Les focus groups
Quatre focus groups ont été organisés autour de différentes thématiques relatives au fonctionnement des MDR : la circulation de l’information, la relation aux partenaires, la citoyenneté, le travail avec les autres directions au sein de la Région.
Chacun de ces temps de travail a été outillé par une animation singulière avec pour objectif de recueillir des données ou des idées venant compléter les autres cadres d’enquête. Les ambassadeurs ont mené ou contribué à l’animation de ces sessions outillées.
Par exemple, ’outil “Parcours de l’information” a été mobilisé lors d’un focus groupe animé par 3 ambassadeurs et 1 designer, au cours duquel 8 participants (agents du siège de la DEF, de la DITEE, de la DITM, de MADEELI, d’un bureau territorial toulousain et la Responsable de la MDR de Mende) ont échangés de manière spontanée sur les deux cas de figure suivants :
- bottom-up → “Un directeur de camping se rend à la MDR et demande une information sur le dispositif Ec’Eau Tourisme pour financer son infrastructure hydroéconome, l’agent d’accueil ne connaît pas le dispositif et doit aller chercher l’information.”
- top-down → “Le conseiller technique du Cabinet s’adresse à 3 MDR pour organiser un atelier de concertation sur 3 territoires, à propos des besoins en formation sur la filière du BTP. Les MDR doivent aller chercher les informations nécessaires à la bonne organisation de ces ateliers.”
Chaque cas est étudié sous l’angle de la circulation de l’information entre les différents intervenants afin d’identifier ce qui fonctionne et ce qui pose problème. Dans un deuxième temps, les participants sont invités à envisager le même cas de figure en 2025 avec une meilleure circulation de l’information pour identifier des idées nouvelles.
Autre exemple, un focus group a été organisé avec des partenaires sur un des lieux d’enquête, afin de percevoir les interactions. Mais nous avons eu plusieurs refus invoquant la difficulté à faire valider une participation par la hiérarchie : “Je ne sais pas si j’ai le droit de venir…”, “Je ferai passer au maire …”, “Je ferai passer aux directeurs…” Les relations avec la Région semblent devoir passer nécessairement par les instances dirigeantes.
2. Les retours des ambassadeurs
La dernière journée de cette 8ème session sera dédiée au partage d’expériences et à l’analyse des données de terrain. Nous nous retrouvons dans un lieu de circonstance, le Lycée Charlemagne à Carcassonne.
Nous commençons la journée par un partage des anecdotes de terrain et des retours d’expériences de ce que les ambassadeurs ont ressenti et perçu sur le terrain.
- À Foix, l’on s’étonne que des collégiens viennent s’installer « au chaud » dans les espaces d’accueil de la maison de région, pour discuter et recharger leur téléphone.
- À Perpignan, on s’étonne de la méconnaissance des usagers sur la région en tant que service publique.
- À Limoux, on est abasourdi par un TER qui embarque un seul usager. Dans les campagne profonde de l’Aude, on constate un désert de services publics.
- À Carcassonne, on rencontre des étudiants dans un bar, qui connaissent la Région parce qu’on peut avoir une carte jeune.
Se confronter à l’usager, à l’habitant
Avec cette session d’immersion, les ambassadeurs sortent vraiment de leur zone de confort. Entrer en contact avec des usagers qui ne semblent pas comprendre, ne pas connaître leur Région en tant que dispositif public est une vraie difficulté pour des agents Région qui ont parfois du mal à sortir de leurs jargons. La perception de la Région est souvent liée aux frontières, aux cultures locales, aux mentalité et à la gastronomie.
Au cours de cette immersion, les ambassadeurs se retrouvent confronter à plusieurs enjeux liés à la méthode :
- Capter des usagers pour faire des entretiens de rue,
- Trouver la bonne posture, la bonne distance avec les usagers,
- Interroger leurs propres outils, leurs propres pratiques,
- Retrouver ou trouver le contact avec les habitants.
Deux types de postures s’expriment parmi les ambassadeurs. Ceux qui aiment le contact du terrain, qui se sentent à l’aise et aiment être surpris (profil en minorité). Ceux qui redoutent le regard des usagers, qui n’osent pas aller vers l’usager et ne sont pas à l’aise avec l’exercice.
Prendre de la distance par rapport à son milieu professionnel
L’intérêt principal de l’immersion partagée par l’ensemble des ambassadeurs, c’est la prise de distance vis-à-vis de son milieu professionnel : « de se remettre les idées en place ».
La prise de conscience principalement exprimée est la méconnaissance des actions de la régions par les usagers. Même les lycées et trains régionaux ne sont pas forcément associés à la Région en tant que services publics. Pour les ambassadeurs, l’enjeu majeur de cette mission autour des Maisons de Région, c’est la visibilité et la lisibilité des services qu’elles proposent.
Traitement et mise en commun de la donnée de terrain
Laure et Nicolas, du Lab’ prennent le relais sur l’animation et propose une mise en commun de la donnée sous l’angle des catégories d’usagers afin que chacun puisse trier les informations recueillies. Les catégories initialement identifiées à Font-Romeu “Agents siège”, “Agents MDR”, “Partenaires”, “Usagers et habitants”, “Élus et décideurs” nous permettent de rapidement partager nos informations et de tirer les premiers éléments d’analyse.
Après la pause déjeuner, Lucas improvise un exercice histoire de se remettre en jambe. Voici le banc de poisson des ambassadeurs Transfo Occitanie.
Analyse croisée et identification des points marquants
Nous terminons la journée en passant en revue l’ensemble des données. C’est un travail long aux vues de la quantité d’informations récoltées par 20 ambassadeurs, sur 4 villes différentes pendant deux jours consécutifs. Chaque catégorie d’usage nous amène sur des discussions assez pointues qui préfigurent notre analyse. Frédérique prend consciencieusement les notes de tout ce qui se dit. Les ambassadeurs, réagissent à des informations qu’ils réinterprètent sous l’angle de leur propre expérience de terrain.
La journée file à grand pas mais nous gardons la concentration de tous. Les ambassadeurs se rendent bien compte de la tâche qu’il reste à accomplir sur ce cas. Nous décidons donc de le prolonger encore d’une session en janvier pour conclure notre analyse par un temps créatif. Le dernier temps de la journée consiste à collectivement préfigurer la forme que prendra notre livrable : un cahier d’idées, un rapport d’immersion, un plan d’usages etc. Autant d’opportunités s’offrent à nous pour positionner notre production, reste à savoir quel format sera le plus pertinent pour faire remonter notre analyse de terrain aux services en charge de mettre en place les projets des futures Maisons de Région.