Session #4 • La gestion des pieds d’arbre

 

L’arbre, c’est le pied ! Février 2016, après une pause de 6 semaines, nous retrouvons les ambassadeurs avec plaisir. Nous nous lançons dans un nouveau cas pratique : la gestion des pieds d’arbres. C’est un sujet bien connu à la Ville, célèbre pour sa complexité. 3 directions se partagent son organisation, d’autres acteurs satellites, de nouvelles missions… un bel imbroglio paraît-il. Nous allons tenter de comprendre ce système complexe, en le représentant graphiquement, en nous frottant à la création d’un “blueprint”, autrement appelé un schéma technique détaillé. Pour cela nous partons à la rencontre d’une dizaine d’acteurs des pieds d’arbres.

Téléchargez le programme des 2 jours de la session 4.

Mercredi matin, voyage de survie sur la lune :
le test de la NASA.

Avant de nous lancer sur les pieds d’arbre, nous prenons une matinée pour soumettre les ambassadeurs au test de la Nasa. Un jeu (sérieux) sur la prise de décision dans un groupe.

Ce matin, les ambassadeurs ne s’y attendaient pas: ils sont propulsés sur la Lune, en mission pour la NASA. Une avarie sur leur vaisseau les a fait atterrir au mauvais endroit et pour rejoindre la prochaine fusée, 300 km sont à parcourir. 4 groupes de cosmonautes sont constitués et dotés d’une liste de 15 objets qu’ils ont réussi à extraire du vaisseau endommagé. Objectif: classer ces objet par ordre d’importance pour atteindre l’objectif.

D’abord le classement se fait individuellement, puis ils doivent decider en groupe d’un classement commun. Au bout d’une heure, on compare les classements. Et surtout, on analyse la façon dont les choses se sont déroulées.

 

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De nombreuses questions sont abordées à l’occasion de ce retour sur expérience : comment les décisions ont-elle été prises ? Par vote, par consensus, par hasard, par concessions réciproques ? Comment les débats ont-ils été menés ? S’est-on donné des règles de discussion ? Qui a pris le leadership ? Y a t il eu des passages en force ? Des débats difficiles à trancher ? Sur quels arguments les décisions ont-elles été prises ? Les prises de décisions individuelles ont-elles été plus efficaces que les prises de décisions collectives ?

La différence d’approche des 4 groupes apporte des enseignements intéressants. Par exemple, il apparaît que dans les groupes où chacun privilégiait l’écoute, la parole équilibrée de tous, sans préjuger de la justesse des arguments des uns et des autres, mais avec une intention partagée d’arriver à un consensus, les solutions les plus crédibles étaient adoptées, sans aucune compétence technique.

Vous pouvez consulter les autres enseignements à la fin de l’article (*).

Vous trouverez ici une explication détaillée du test de la NASA.

Mercredi après-midi : le pied à bras le corps.
La cartographie thématique

Nous plongeons dans le sujet par une cartographie des pieds d’arbres. Chaque ambassadeur est venu avec des photos de pieds d’arbres qu’ils ont pris eux-mêmes. Le groupe classe les photos par catégorie: “parc à cochon” (des enclôts en bois), arbre mort, grille, stabilisé, pleine terre, permis de végétaliser, etc. Ce qui apparaît en premier lieu est la diversité des situations possibles, et donc la complexité du sujet. L’intérêt de la méthode est de pouvoir identifier rapidement et collectivement les typologies des pieds d’arbres sur le territoire, à partir d’éléments réels rencontrés.

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Présentation du sujet et premières versions du schéma technique détaillé.

Puis nous accueillons Nicolas Roy, chargé de Mission au Pôle Espace Public, au Secrétariat Générale de la Mairie de Paris. Il nous présente le sujet et explique les problématiques liées à l’entretien des pieds d’arbres. Un échange permet aux ambassadeurs de prendre la mesure du sujet et de s’approprier les informations.

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Pendant ce temps, Arnaud et Lilas réalisent une première version du “blueprint”. Le blueprint, autrement appelé schéma technique détaillé, est un outil opérationnel qui décrit la nature et les caractéristiques de l’interaction de service dans le détail. Le but est de vérifier sa pertinence. Il met en regard le parcours usagers (ce qui est visible) et le processus technique (de l’administration) qui permet de faire fonctionner le service. Ce dernier nous intéresse tout particulièrement.

Arnaud et Lilas présentent donc une esquisse du schéma de la gestion des pieds d’arbre, à partir des propos de Nicolas Roy. En colonne, on y trouve les étapes de vie de l’arbre fraîchement planté, à l’arbre fraîchement coupé, et en ligne les problématiques abordées, les typologies d’arbres, les actions réalisées, les points de contacts avec l’usager, etc.

En fin d’après-midi, des binômes sont constitués pour préparer les entretiens du lendemain. Avant la session, un petit groupe d’ambassadeurs (Sébastien, Jean Hervé, Saïd, sous le leadership d’Hervé), avait travaillé très efficacement à repérer les services et personnes à rencontrer, et à prendre une dizaine de RDV.

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Chaque groupe est invité à construire son propre schéma pour mener leur entretien, à partir de ce qu’ils ont compris et de celui de Lilas et Arnaud. Ce schéma esquissé est un outil d’entretien, on parle d’ailleurs d’”entretien outillé”. Cet outil – autrement appelé “objet martyr” ou “objet à réaction”- permet d’incarner un premier point de vue de l’organisation des pieds d’arbres, et de provoquer des réactions constructives de la part des interlocuteurs. Il n’est pas figé est appelé à se modifier, il s’agit d’ailleurs de l’alimenter pendant l’entretien.

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En parallèle, un groupe est chargé de réfléchir aux questions à aborder lors des entretiens, et on imprime le tout.

Notons que nous n’allons pas expérimenter une « enquête utilisateur » comme lors de la session 2, mais un entretien “outillé” et ciblé sur la seule compréhension des personnes rencontrées de la gestion des pieds d’arbres.

 

Jeudi, jour du Post-it. Les entretiens le schéma technique grand format.

La matinée, qui commence à 8 heures pour certains, est consacrée à la conduite des entretiens. Nos interlocuteurs sont représentatifs de tous les services impliquées dans la gestion des pieds d’arbres et de toute la chaîne : depuis la préparation de la fosse jusqu’à la coupe de l’arbre mort, le nettoyage, le soin aux arbres, l’entretien, l’obtention du permis de végétaliser (un dispositif qui permet aux habitants de gérer des micro parcelles de terres). Quelques associations sont également rencontrées, pour avoir le point de vue des bénéficiaires des permis de végétaliser

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Les ambassadeurs reviennent au fur et à mesure pour rassembler leur matière, mettre au propre et préparer les diapositives qui serviront à l’accrochage pour la prochaine session. Ambiance très studieuse d’atelier.

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L’après-midi, les ambassadeurs se divisent en 2 groupes et mettre en commun les informations sur des grands schémas. Consciencieusement, chacun.e déroule ce qu’il.elle a appris au cours de l’échange, et le positionne sur le grand panneau blanc. Ambiance encore plus studieuse et concentrée, où papillonnent les post-it de toutes les couleurs, où l’on voit les ambassadeurs se creuser la tête pour tenter de démêler l’écheveau de ce sujet difficile. Nous commençons à avoir mal à la tête, tant il y a d’information à traiter et tant l’effort est intense pour essayer d’y comprendre quelque chose.

 

Retours sur les 2 jours

A 16h15, nous nous rassemblons pour prendre le temps de se parler de l’actualité et procéder au feed-back de fin de session. Ce qui ressort, c’est que le jeu de la Nasa a beaucoup intéressé les ambassadeurs, dont certains ressortent avec plein de questions sur les modes de décisions, et sur leur façon de travailler en équipe.

Le travail sur les pieds d’arbres et le blueprint a également beaucoup intéressé, la conduite des entretiens plaît toujours autant. En revanche, comme nous nous arrêtons sans avoir fini le travail, une certaine frustration est évoquée, avec l’idée pour certain.e.s (mais pas tous.tes) qu’ils.elles auraient apprécié une troisième journée. Des doutes sont exprimés sur la capacité du blueprint à faire émerger un réel processus de gestion des pieds d’arbres. Pour cause, il n’y a peut-être pas de processus…

Les résidents tentent de rassurer les ambassadeurs en leur disant que ce sentiment est normal, que l’exercice a volontairement été choisi pour montrer la variété des outils mobilisables par le design, et montrer que cela peut aussi être un peu âpre et difficile, mais que nous avons toute confiance dans l’aboutissement de cet exercice, quel que soit son résultat.

Malgré tout, nous sommes heureux d’avoir passés ces deux jours ensemble, car l’esprit du groupe ouvert, dans le dialogue, énergisant est toujours présent.

D’ailleurs, cette ouverture est telle que nous avons pu accueillir deux collaborateurs de la 27e Région, Wesley et Anne pendant une journée et demi, ainsi que Marie, qui venue en visite jeudi après-midi pour Paris-Métropole, comme s’ils étaient ambassadeurs eux-mêmes, sans autre forme de procès 😉 !

Heureusement, nous nous retrouverons dans trois semaines seulement pour avancer notre travail !

 


 

Quelques liens pour explorer le sujet des pieds d’arbres à Paris :

– sur le site web de la Ville

Cartographies des arbres de rue (plan de voirie développé par la DEVE)

Cartographie des arbres des espaces verts

Article de Patricia Pellegrini, anthropologue de proche et de l’environnement, relations sociétés et autres vivants.

 


* Enseignements du test de la Nasa.

Ce qui émerge c’est que la lecture préalable ou non des règles du groupe change la façon dont chacun s’investit dans le principe de faire respecter ou non le consensus. Ensuite, il apparaît que certains arguments peuvent être validés par le groupe, sur le présupposé de la compétence technique d’une personne, même si cette dernière n’a pas de diplôme de cosmonaute ;-)…

Le débat montre que l’autorité technique supposée n’est pas forcément celle qui donne le plus de résultats probants, en revanche le vécu de certains, aiguisant leur intuition, permet d’être plus proche de solutions réalistes, même sur un sujet que personne ne maîtrise techniquement (survivre sur la Lune). D’autres, très joueurs, avouent qu’ils s’étaient donnés comme objectif individuel de faire passer leur classement, s’évertuant à trouver toutes sortes d’arguments pour convaincre les autres, n’importe quel argument. Certains témoignages ont montré que lorsqu’on est convaincu.e d’un argument, mais que la majorité est à l’opposé, on ne lutte pas forcément pour avoir raison – même si le résultat final prouve que l’on avait raison.

Et surtout, il apparaît que dans les groupes où chacun privilégiait l’écoute, la parole équilibrée de tous, sans préjuger de la justesse des arguments des uns et des autres, mais avec une intention partagée d’arriver à un consensus, les solutions les plus crédibles étaient adoptées, sans aucune compétence technique.

Et, malgré nos premiers réflexes de réflexion, le vote à la majorité n’apparaît pas comme la meilleure méthode de décision.

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